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Le libéralisme blessé – José María Lassalle

José Maria Lassalle est professeur de philosophie du droit à l’Université pontificale de Comillas et dirige le forum d’humanisme technologique de la business school ESADE. Il a été secrétaire d’État dans le gouvernement espagnol.

 «L’ère populiste» dans laquelle nous nous trouvons est, selon vous, peu favorable au libéralisme politique. Pourquoi ?

Parce que le populisme contient une réponse émotionnelle et autoritaire qui remet ouvertement en question le fait que le libéralisme offre des réponses aux incertitudes que le 21e siècle projette.

Vous affirmez que le dilemme liberté – sécurité s’est désormais transformé en opposition : ordre vs chaos. À quoi est dû ce changement ?

Il est dû au fait que le magma d’incertitudes, et l’absence de réponses offertes par la démocratie libérale face à ces dernières, provoquent un besoin d’hyper-sécurité. Cela amène des solutions autoritaires pour neutraliser ce qui est perçu comme un scénario de chaos structurel. Face au chaos extérieur, la politique de «bunkerisation» des communautés politiques.

Vous présentez le néolibéralisme comme un courant s’inscrivant en porte-à-faux du libéralisme originel. Comment expliquez-vous cette évolution ? Et quelle différence ?

Le néolibéralisme est né pour légitimer les inégalités générées par la révolution industrielle. Ce courant a adopté un discours économiciste qui considère le succès conduisant à la prospérité comme quelque chose de vertueux qu’il faut préserver, même s’il condamne ceux qui n’y participent pas à subir les inégalités et la marginalisation. L’homo oeconomicus a remplacé le citoyen et l’individu. Le libéralisme originel, quant à lui, défend les deux derniers. Il s’agit donc d’un humanisme qui estime que la liberté doit aller de pair avec l’égalité pour que la dignité humaine soit possible.

Selon vous, la révolution numérique met en danger nos démocraties libérales. Pourquoi ?

Parce que la révolution numérique libère un pouvoir sans régulation ni contrôle démocratique. Les grandes plateformes numériques représentent un pouvoir aristocratique qui nous gouverne par des algorithmes et nous traite comme des données.

Quel avenir voyez-vous au libéralisme ? Quelles réformes sont nécessaires ?

Le libéralisme doit approfondir son engagement dans le développement de politiques de collaboration qui favorisent un individualisme qui pense aux autres, sur la base de l’empathie et du respect. Être «un» ne peut pas se faire au détriment des autres. Ici, la pensée de Spinoza peut nous être d’une grande utilité.

Pour plus d’informations, découvrez notre présentation du livre de José Maria Lassalle El liberalismo herido (Le libéralisme blessé).

Propos recueillis par Diego Taboada

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